L'intelligence artificielle s'apprête à transformer radicalement notre industrie cinématographique. Pouya Shahbazian, le producteur derrière la franchise à succès Divergent, vient de lancer Staircase Studios AI, un studio basé entièrement sur l'IA qui promet de créer des films de qualité professionnelle pour une fraction du budget habituel. Son objectif ? Produire environ 30 longs-métrages à petit budget au cours des trois à quatre prochaines années, bouleversant potentiellement tout l'écosystème de production traditionnel.
Alors qu'un film hollywoodien moyen coûte aujourd'hui plus de 50 millions de dollars, le nouveau studio de Shahbazian mise sur sa technologie propriétaire baptisée ForwardMotion. Cette innovation permet de produire des films de qualité studio pour moins de 500 000 dollars chacun – soit tout de même une réduction de 99% des coûts habituels. On comprend donc l'envie de certains, et la peur des autres.
Pour prouver la viabilité de cette approche révolutionnaire, Staircase Studios AI a dévoilé un teaser de cinq minutes de son premier long-métrage, The Woman With Red Hair (La Femme aux Cheveux Rouges). Ce film, dirigé par Brett Stuart, adapte un script de Michael Schatz qui figurait sur la prestigieuse Black List de 2016, cette sélection annuelle des meilleurs scénarios non produits à Hollywood.
Voici les cinq première minutes du film The Woman With Red Hair :
Contrairement aux craintes d'une IA remplaçant complètement les créateurs, Staircase Studios adopte une approche hybride. The Woman With Red Hair bénéficie des designs de personnages créés par l'ancien cadre de Pixar Teddy Newton (Les Indestructibles) et des conceptions artistiques de l'animateur récompensé aux Emmy Awards Alfred Gimeno (Kung Fu Panda).
Le film raconte l'histoire vraie d'une résistante pendant la Seconde Guerre mondiale aux Pays-Bas – un sujet historique profond que beaucoup jugeaient trop coûteux à produire via des méthodes traditionnelles. Pour donner vie à ces personnages générés par IA, le studio a recruté les talents vocaux de Maya-Nika Bewley, Leander Vyvey, Angus Castle-Doughty et Geoffrey Breton.
L'initiative est loin d'être un projet marginal. Pouya Shahbazian prend la direction en tant que PDG, fort de son expérience sur des productions majeures, tandis que Brett Stuart supervise la réalisation par IA. Côté financement, le studio a attiré Kenneth Lerer, co-fondateur du Huffington Post et figure influente du capital-risque en tant que directeur émérite de Lerer Hippeau.
"Après avoir développé et vendu 150 projets dans le système des studios au cours des 15 dernières années, j'ai été témoin de bien trop d'inefficacités pour continuer avec le statu quo," explique Shahbazian, dont les crédits incluent également Love Simon de Greg Berlanti et Shadow & Bone de Shawn Levy et Eric Heisserer.
"Je me suis consacré à associer une utilisation éthique de l'IA avec les atouts les plus sous-utilisés de notre industrie – des histoires négligées qui attendent d'être produites par d'excellents scénaristes et réalisateurs."
Cette initiative survient dans un contexte où l'intelligence artificielle progresse rapidement à Hollywood, malgré les vives protestations lors des grèves de la SAG-AFTRA en 2023. Nous observons déjà plusieurs productions mainstream incorporant l'IA, comme The Brutalist qui l'a utilisée pour perfectionner les dialogues en hongrois d'Adrien Brody, ou Emilia Perez qui a exploité cette technologie pour augmenter la tessiture vocale de l'actrice principale.
Sans attendre de voir l'accueil réservé à son premier film, Staircase Studios AI prépare déjà sa seconde production, Every Living Creature, un thriller d'aventure animé réalisé par Bernie Su (Artificial) à partir d'un scénario adapté par J.R. Arellano (Flicka 2). Bon, avons-le, ça ne fait pas beaucoup rêver, tout ça.
Si cet article vous effraie, voici une image tirée du film The Woman with Red Hair : rassurez-vous, tout ça n'est pas encore complètement au point. Mais pour combien de temps, encore ?
Cette initiative de Shahbazian pourrait marquer un point de bascule pour l'industrie tout entière. Si ces films à 500 000 dollars parviennent à atteindre une qualité comparable aux productions traditionnelles coûtant 100 fois plus, nous assisterons probablement à une transformation complète du modèle économique d'Hollywood.
La véritable question n'est plus de savoir si l'IA va intégrer le processus de création cinématographique – elle y est déjà – mais plutôt de déterminer si les émotions authentiques qui font la magie du cinéma peuvent être préservées dans cette nouvelle ère algorithmique. Le succès ou l'échec de Staircase Studios AI pourrait bien définir l'avenir même de notre septième art.
Source: THR